Mes chers compatriotes,
Il y’a seulement 18 mois, le 30 décembre 2013, j’installais ici même, dans cette salle le comité national de pilotage de la transition de l’analogique vers le numérique, auquel j’avais fixé la mission de conduire le processus de mise en œuvre des accords dits du GE06 , auxquels nous avions souscrits, et qui nous engageaient à procéder au passage de notre pays à la télévision numérique au 17 juin 2015 à 01h.
C’est avec satisfaction que je m’adresse à vous ce soir, pour vous annoncer que le Sénégal est effectivement parvenu à assurer le passage à la télévision numérique. Dès ce soir, nous allons procéder au basculement région par région, avec une première zone qui couvre plus de 60 % de la population, qui sera suivie aussitôt de la couverture intégrale du territoire.
Ce 17 juin, 17 chaînes de télévision sénégalaises seront désormais présentes partout sur le territoire national, ce qui correspond parfaitement à la deuxième dimension du PSE qui prône la réduction des inégalités sociales et la redistribution équitable des fruits de la croissance.
D’ores et déjà des milliers de décodeurs sont distribués à divers leaders d’opinion, et à des citoyens de toutes conditions dans les régions de Dakar, Thiès, Diourbel, Kaolack, pour les tests d’usage dans les conditions nécessaires à une telle opération. Je salue tous les compatriotes qui en ce moment même suivent cette allocution, en mode analogique mais aussi en mode numérique. Les décodeurs fortement subventionnés reviendront à 10 000 FCFA aux usagers contre 40 000 FCFA et plus sur le marché.
Ma satisfaction est d’autant plus grande, que j’ai fait confiance à l’expertise nationale sénégalaise, pour la conception et la mise en œuvre de bout en bout du processus qui nous vaut d’être aujourd’hui le seul État francophone et parmi les très rares pays africains – moins d’une dizaine sur les 54 que compte le Continent – qui ont été en mesure de respecter les engagements pris en 2006 à Genève. C’est une prouesse qui fait notre fierté.
Le modèle de partenariat public privé de même que l’exploitation de toutes les potentialités de la norme de seconde génération choisie par l’Afrique et à laquelle devront prochainement se convertir les pays européens qui ont déjà basculé avec la précédente version, nous donnent l’occasion de mettre en œuvre les ambitions que j’avais déclinées lors de l’installation du CONTAN.
Je voudrais manifester et exprimer avec force mes félicitations et mes encouragements au groupe EXCAF qui a été choisi parmi plus d’une vingtaine de soumissionnaires internationaux, pour réaliser ce chantier extrêmement complexe, selon les modalités définies par le CONTAN. Le modèle est unique car ni l’État du Sénégal, ni le contribuable, ni aucun bailleur de fond n’a été sollicité pour la moindre dépense. Nous n’avons contracté aucune dette pour disposer d’une infrastructure moderne sur la base d’un investissement à hauteur de 39 Milliards consacré par des investisseurs nationaux. La société Excaf a gagé son retour sur investissement sur l’octroi par l’Etat de deux fréquences pour commercialiser son bouquet. En ces circonstances, j’ai un sentiment de fierté et d’accomplissement. Le génie sénégalais est passé par là, en ce qu’il fait de meilleur. C’est pourquoi, j’ai une pensée pieuse pour Monsieur Ibrahima Ben Bass Diagne, le visionnaire fondateur du Groupe Excaf trop tôt arraché à notre affection.
Je souhaitais que le passage de la télévision analogique à la télévision numérique soit un moment de concrétisation de notre volonté d’asseoir une société du savoir, capable de tirer le meilleur profit de la révolution numérique. Ce passage doit être suffisamment encadré afin de nous permettre de faire face aux exigences de la mondialisation.
Notre option est celle d’une télévision interactive alliant le Broadcast et le Broadband, avec la mise en place de différentes plateformes de services : guide électronique de programme, archivage, analyse d’audience, Vidéo à la demande, Videos de rattrapage, sondage. S’y ajoutent les multiples fonctions associées à l’enregistrement de programmes directement à partir du décodeur. Nous avons là le loisir d’utiliser la télévision non plus seulement comme un outil d’information et de détente, mais aussi et surtout comme un support pour le développement de l’économie numérique, vecteur de croissance par excellence.
La mise en place d’une infrastructure de Télévision Numérique Terrestre (TNT) sur l’ensemble du territoire national et leur mise à la disposition des opérateurs de télévision vont avoir un formidable impact sur les investissements et les charges d’exploitation des entreprises audiovisuelles. En effet, jusqu’à ce jour, le titulaire d’une autorisation d’exploitation d’un service audiovisuel était soumis à diverses obligations qui se déclinent en importantes charges.
En effet obligation lui est faite :
- de couvrir l’ensemble du pays en installant des émetteurs et des antennes de réception sur toute l’étendue du territoire national.
- d’assurer les charges de maintenance de ses installations, aussi bien au niveau du personnel, de la sécurité, de la fourniture d’énergie (Sénélec, groupe électrogène, onduleurs) .
- de prendre en charge la couverture satellitaire pour le transport de ses programmes en contractant avec un opérateur international pour pouvoir acheminer son signal moyennant des paiements réguliers et importants.
- de s’acquitter d’une redevance auprès de l’ARTP au titre de l’occupation d’une fréquence affectée à l’exploitation d’un service audiovisuel.
Seul le service public se rapproche de ces exigences contractuelles. Avec l’avènement de la TNT, la fréquence attribuée est retirée conformément à son régime juridique et à la nécessité de procéder à un réaménagement du Spectre. Je rappelle que la fréquence est une ressource publique et constitue une emprise accordée sur le domaine public de l’État. Elle n’appartient donc pas aux opérateurs mais au patrimoine de l’Etat. Leur retrait, dans le cas d’espèce, n’entraine pour l’État que l’obligation de compenser par l’affectation d’un canal dans le multiplex.
La redevance initialement prévue – et jamais acquittée – en contrepartie de l’occupation d’une fréquence, se transforme dés-lors, en redevance-droit de passage par le multiplexeur. Comme nous le constatons, toutes les autres charges et postes de dépenses des entreprises de télévision que je viens d énumérer disparaissent grâce à l’investissement consenti par l’Etat. Ce qui leur donne la possibilité de faire d’importantes économies sur leurs charges actuelles et de libérer des ressources à investir dans des programmes de qualité, dans la formation, la mise à niveau et dans les services à haute valeur ajoutée qu’offre la TNT.
A ce propos j’ai décidé du gel des fréquences non encore exploitées et de l’audit de toutes les fréquences en dormance, distribuées par dizaine sans discernement et sans base légale par le passé. Les attributaires devront justifier de leurs conditions d’attribution et de leur éligibilité, du respect de la convention et du cahier des charges applicables à l’exploitation d’un service audiovisuel.
Je souhaite que les capacités d’exploiter quelques canaux pour diffuser de nombreuses chaines de télévision, soient judicieusement exploitées pour enrichir le panorama audiovisuel par des chaines thématiques dans les secteurs de l’éducation, de la santé, du tourisme, de l’agriculture, de l’environnement et de la bonne gouvernance, entre autres.
L’enjeu des infrastructures étant pour l’essentiel maitrisé, il nous faut à présent nous engager résolument dans la perspective de la production de contenus audiovisuels de qualité, conformes aux attentes de nos population et apte à propulser l’industrie prometteuse de l’audiovisuel, dont les capacités de génération d’emplois et de richesse sont indiscutables.
Mes chers compatriotes,
Je ne doute pas que chacun d’entre nous évalue à sa juste valeur le pas que allons franchir avec le numérique, et que les éditeurs comme les usagers sauront faire de la télévision sénégalaise un outil de convivialité, adossé à des valeurs propres à un peuple responsable et soucieux de son unité.
Les nouveaux médias qui désormais vont conditionner notre quotidien, avec la convergence de l’internet haut débit et de la télévision, l’éclosion du multi-écrans et l’énorme potentiel du mobile et des objets connectés, nous invitent à réaliser sans sans tarder la convergence juridique en adéquation avec le nouvel écosystème numérique.
Le CONTAN a travaillé sur une série de propositions qui ont été soumises à l’appréciation des services compétents de l’État.
Mes chers compatriotes,
J’appelle chacune et chacun d’entre vous à prendre exemple sur la conduite de ce projet, pour avoir d’avantage confiance dans nos capacités à réussir de grands projets, si nous procédons avec méthode, osons aller de l’avant et faisons confiance à nos propres capacités.
Je ne saurais clore mon propos en cette journée de lancement officiel de la Transition vers le Numérique sans exprimer mes vives félicitations au Président du CONTAN, Monsieur Babacar TOURE, Président du CNRA, qui a bien voulu accepter cette mission hautement improbable vu les délais. Votre engagement à mes côtés, votre sens de l’Etat et de l’intérêt général, votre intégrité et votre détermination sans faille, vous ont permis de manager le processus avec talent et intélligence. Votre loyauté, votre patriotisme et votre fidélité à mes orientations et directives, ont fini d’illustrer si besoin en était encore la légitimité et la pertinence de mon choix.
Je félicite le Directeur Exécutif du CONTAN et avec lui son équipe pour les tâches accomplies dans le cadre du comité de pilotage et sous votre autorité. Vous saviez pouvoir compter sur lui quand vous m’avez proposé de le nommer au poste de Directeur Exécutif du CONTAN, car, vous l’aviez déjà fait venir auprès de vous en qualité d’expert du CNRA.
Je félicite également, les membres et les équipes du CNRA, qui ont porté et supporté le fonctionnement du comité de pilotage et des experts pendant prés d’un an avant la mise en place des ressources prévues par l’Etat.
Au comité de pilotage et à son comité ad hoc chargé d’encadrer la phase finale d’opérationnalisation du processus, je veux dire toute ma satisfaction pour le travail accompli avec expertise et abnégation – et jusqu’à présent bénévolement m’a confié votre Président- D’ailleurs je compte remédier à cette situation en octroyant aux membres du Comité de pilotage et bien sûr en commençant par son Président, les indemnités de session qui leur sont dues et qui n’ont jamais été perçues. Continuez dans cette voie, car c’est là le chemin qui nous conduira à l’émergence.
Mes chers compatriotes,
En cette veille de début du mois bénis du Ramadan, je prie pour que toutes les grâces se répandent sur notre cher Sénégal à la faveur de cette émergence numérique, qui j’en suis sûr tiendra la promesse des graines d’un hivernage heureux et bienfaisant.
Je vous remercie.