Avis Trimestriel N°2014/04 du 17 Janvier 2014

(OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE)

Les médias audiovisuels, de par leur contenu, participent à la construction d’attitudes et de comportements qui influencent la marche de la société. Ils fournissent au public des prestations dont l’interprétation contribue au développement de la personnalité par l’information, l’éducation et le divertissement.

La conception des programmes doit prendre en charge les caractéristiques socioculturelles, la diversité et la pluralité de notre société. L’importance des médias audiovisuels appelle  les éditeurs de programmes à plus de rigueur et de professionnalisme dans la vérification, le traitement et la diffusion de l’information, dans l’élaboration des grilles et le choix de l’offre. La protection du jeune public, l’intégrité du message publicitaire, la diffusion de débats à caractère politique, les questions de santé publique, l’option laïque de la République servent, entre autres, de paramètres d’évaluation de la pertinence de la production audiovisuelle.

 Le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel, conformément aux missions que lui assigne la loi n° 2006-04 du 04 janvier  2006, veille à la qualité des programmes proposés par les éditeurs au public afin que les valeurs fondatrices de la société sénégalaise soient toujours préservées.

Au cours du dernier trimestre de l’année 2013, les services de monitoring du CNRA ont noté des dysfonctionnements et des manquements dans les programmes de certains médias audiovisuels. Le présent avis  propose un échantillon représentatif des tendances constatées et formule des recommandations pour les corriger.

L’Assemblé du Collège des Conseillers du CNRA,  après en avoir délibéré en sa séance du 17 janvier 2014, rend public le présent avis trimestriel.

I/ DYSFONCTIONNEMENTS ET MANQUEMENTS

– Les divers dysfonctionnements et manquements relevés à partir d’un échantillonnage tiré des rapports des services de monitoring concernent  les constats ci-dessous énumérés.

 1/  La diffusion d’images, de propos et d’actes pouvant heurter la sensibilité d’une composante de la population, notamment le jeune public, aux heures de grande audience, en violation des stipulations des cahiers de charges relatives aux catégories d’émissions, aux heures de diffusion, à la signalétique et à l’avertissement préalable du public.

Pour rappel, d’après les cahiers des charges applicables aux médias audiovisuels :

 –          le titulaire est tenu de respecter la classification des programmes selon cinq degrés d’appréciation de l’acceptabilité de ces programmes, au regard de la protection de l’enfance et de l’adolescence, et leur applique la signalétique correspondante ;

 –          les programmes diffusés pouvant troubler les enfants de -12 ans, notamment lorsque le scénario recourt de façon systématique et répétée à la violence physique ou psychologique, ne doivent pas être diffusés avant 22h ; les bandes-annonces de ces programmes ne doivent pas comporter de scènes susceptibles de heurter la sensibilité du jeune public ; en outre, elles ne peuvent être diffusées à proximité des émissions pour enfants ;

 –          les programmes comportant des scènes à caractère érotique ou de grande violence, susceptibles de nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des mineurs de -16 ans, ne peuvent être diffusés qu’après 22h30 ; les bandes-annonces de ces programmes ne doivent ni comporter de scènes susceptibles de heurter la sensibilité du jeune public ni être diffusées avant 20h30 ;

 –          le titulaire doit prendre les précautions nécessaires lorsque des images difficilement soutenables ou des témoignages relatifs à des événements particulièrement dramatiques sont diffusés dans les journaux, les émissions d’information ou toute autre émission du programme. Le public doit alors en être averti préalablement.

 2/ La diffusion d’émissions de voyance en direct avec appels téléphoniques sur serveurs et d’autres servant de tribune à des guérisseurs traditionnels ou des marabouts qui prétendent pouvoir soigner diverses maladies.

 3/ La profusion de publicités et de propagandes dans les médias audiovisuels, particulièrement sur les chaînes de télévision, par les présentateurs.

 4/ La diffusion, suivie de rediffusions, d’émissions de débats à caractère politique marqués par des propos outranciers et des comportements violents des protagonistes.

 5/ La récurrence des jeux organisés sur certains médias audiovisuels et nécessitant l’envoi de SMS ou des appels sur serveurs sans indication de coût.

 

6/ Une certaine légèreté dans le traitement, la vérification et la présentation de l’information avant sa diffusion.

 

 

II RECOMMANDATIONS

Face à de tels dysfonctionnements et manquements qui constituent une violation des dispositions des textes législatifs, réglementaires et des stipulations des cahiers des charges en vigueur au Sénégal dans le domaine de l’audiovisuel, le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel recommande aux éditeurs de programmes audiovisuels :

1/ de se conformer aux stipulations des cahiers des charges en dotant leurs structures respectives de la commission prévue par  les textes et dont les attributions   sont clairement indiquées ; dans le souci de satisfaire à l’obligation de protection du jeune public, la diffusion de certaines émissions  doit être programmée à des heures  qui permettent de préserver cette catégorie importante de la population ;

 2/ de se garder de servir de tribune à des individus dépourvus de toute qualification légale et dont la promotion expose des populations non averties à des risques de détérioration de leur santé, soumet les professionnels de la santé à une concurrence déloyale, crée un environnement favorable à l’exploitation de franges importantes de la population qui accordent un certain crédit aux propos de ces individus relayés par les médias audiovisuels ;

 3 / d’éviter de confondre le métier de journaliste avec celui de publicitaire ou de propagandiste ; tout comportement de ce genre, de la part du journaliste, est strictement interdit ; ce dernier ne  peut  accepter aucune consigne directe ou indirecte des annonceurs ;

 4/  d’éviter que les médias audiovisuels ne véhiculent des propos outranciers, voire outrageants, et ne servent de tribune pour des actes violents ou contraires aux convenances et aux règles de bienséance ; le rôle éducatif des médias audiovisuels ne s’accommode pas de la publicité de certains comportements qui n’honorent ni leurs auteurs, ni l’activité sportive ou politique qu’ils mènent, encore moins les populations au profit de qui ces personnes prétendent agir ;

 5/ de s’entourer des garanties requises pour assurer l’intégrité du processus des jeux qu’ils organisent, en informant les participants sur le coût réel des appels qui permettent d’y prendre part, et pour préserver les couches vulnérables de la tentation du jeu préjudiciable à l’équilibre de certains foyers, en avertissant le public sur les risques de dépendance ; il revient également aux éditeurs de médias audiovisuels de concevoir des actions de sensibilisation pour une meilleure compréhension, par les populations, des aléas du jeu ;

 6/ de toujours rester attachés aux principes éthiques et déontologiques, qui gouvernent l’exercice du métier de journaliste, et de faire preuve de rigueur et de professionnalisme  dans la vérification, le traitement et la diffusion de l’information.

 Par ailleurs, le CNRA invite les  acteurs à promouvoir le respect et la préservation de l’image des chefs religieux en qui se reconnaissent des millions de compatriotes. A cet égard, l’utilisation de l’image de son Éminence Mgr Théodore Adrien Cardinal SARR, Archevêque de Dakar, pour illustrer le traitement de questions liées à des accusations de malversations, et pendantes devant la justice, n’est pas acceptable ; elle relève des pratiques à bannir.

Le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel appelle les éditeurs de programmes audiovisuels  à veiller sur la mise en œuvre effective de ces recommandations afin de faire jouer aux médias audiovisuels leur mission et rôle d’information, de formation, d’éducation et de divertissement.

 

Pour l’Assemblée du CNRA

 

Le Président

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